La filière télécoms française s’organise pour la 5G


Les équipementiers français doivent pouvoir peser dans la bataille des futures normes mobiles. Le plan Souveraineté Télécoms, présenté à Arnaud Montebourg, propose des pistes face aux asiatiques, bien mieux positionnés.

Netcom Group En novembre prochain, la France répondra d’une seule voix à l’appel à projets européen qui vise à définir la future norme 5G. Un consortium est en train de se créer sous l’égide d’Orange, qui comptera aussi Alcatel-Lucent, Thales, eBlink et Sequans, entre autres. « Il s’agit de décider quelle sera l’ossature du réseau très haut débit de demain. Nous créons un “club France” afin de permettre à notre pays de jouer le même rôle pour la 5G que pour la 2G », explique Philippe Keryer, directeur de la stratégie d’Alcatel-Lucent et chef de projet pour le plan Souveraineté Télécoms au sein du comité de pilotage des 34 plans industriels lancés par Arnaud Montebourg, ministre de l’Economie.

Rattraper le retard

La partie s’avère plus difficile qu’au début des années 1990, lorsque l’Europe avait inventé le GSM avec l’aide des ingénieurs français. Car aujourd’hui, les équipementiers les plus riches se trouvent en Asie. La Corée, qui pousse Samsung, s’est donné les moyens d’investir vite et fort dans la 5G, et le géant chinois Huawei va y consacrer 600 millions de dollars d’ici à 2018. Il faut donc se mobiliser pour rattraper le retard. C’est ce qu’a laissé entendre Michel Combes, le PDG d’Alcatel-Lucent, lors d’une conférence « Les Echos » en fin de semaine dernière : « Seuls 5 % des clients de la 4G dans le monde sont en Europe. Il ne faut pas se gargariser en disant qu’on a un superécosystème numérique », a-t-il rappelé.

Pour les entreprises du secteur, la date de novembre est d’autant plus importante qu’il y aura des subventions européennes à récolter. Le concurrent suédois d’Alcatel-Lucent, Ericsson, est un peu mortifié de ne pouvoir faire partie de ce « club France » malgré une présence très ancienne dans l’Hexagone. L’ouverture aux partenaires européens n’est prévue que dans une deuxième phase. La 5G n’est pas la seule priorité établie dans la feuille de route du plan Souveraineté Télécoms, déjà rendue au ministre. Mais elle incarne les deux objectifs de ce plan. D’abord, il fallait engager un dialogue entre les acteurs industriels alors que les grandes entreprises n’ont généralement pas de considération pour les petites. Les leaders de la filière se sont d’ailleurs engagés à « parrainer » des start-up, en les emmenant dans des rendez-vous ou bien en les aidant à lever des fonds. Le deuxième objectif était de doter le pays des infrastructures de communication de demain, afin de ne pas perdre la maîtrise de son destin. D’ici à 2020, de nouveaux usages devraient exploser, comme le cloud, les objets connectés, les compteurs énergétiques intelligents, ou encore le « big data ». Et c’est aujourd’hui que se livre la bataille des standards.

La sécurité, thème central

L’un des grands enjeux pour la France sera la sécurité – un thème étroitement lié à celui de la souveraineté quand on parle des infrastructures vitales que sont les infrastructures télécoms. « Associé à ces évolutions technologiques, le besoin de plus de sécurisation des données, privées et professionnelles, nécessite d’intégrer ces besoins tant en termes de technologie, que de règles à établir, voire de référentiels à respecter », est-il écrit dans la feuille de route. L’Agence nationale pour la sécurité des systèmes d’information préside ainsi un groupe de travail consacré à la virtualisation des réseaux. Cette transformation, dont Alcatel-Lucent s’est fait le champion, qui consiste à diminuer la part des équipements physiques dédiés avec des logiciels assurant les mêmes fonctions à partir de serveurs banalisés, risque d’ouvrir des failles de sécurité dans les réseaux si l’on n’y prend garde. Les autres grandes priorités sont le très haut débit fixe, avec des formations aux métiers de la fibre (derrière Novea) et la mise au point d’un prototype de radiocommunications 4G sécurisées pour la police et les militaires (Thales, Airbus Defence & Space). Chacune des entreprises qui ont participé à l’élaboration de la feuille de route depuis la fin 2013 va devoir mettre un peu de sa poche pour faire avancer les projets. Alcatel-Lucent va par exemple investir dans des projets de R&D correspondants à « quelques dizaines de millions d’euros ».


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